Serge tournait en rond. Se rongeait les ongles. À peine une demi-heure avant le début du spectacle, ni Léonide, ni Maria, ni Nicolas n'étaient arrivés. « Putain d'artistes à la con », se disait Serge en engueulant Pablo qui trinquait un coup au lieu de rafistoler les
costumes.
Jean et Érik se querellaient : Érik aimait bien les idées de Pablo, qui demandait des modifications au texte de Jean (on est au ballet, ce sont les danseurs et les décors qui comptent, pas le texte!); il n'aimait pas l'idée du gramophone géant, qui n'apportait que tapage et brouhaha; Jean ne comprenait pas que Pablo veuille ajouter deux managers et un cheval au texte initial, il trouve l'idée sans goût; de plus, Pablo exige qu'ils soient plus grands (3 mètres!) que les vedettes du spectacle : un acrobate et un prestidigitateur chinois.
Ce ballet cubiste marquera la fin de la guerre, celle que Wilhelm Albert (Guillaume pour les intimes) a faite pour se déclarer « vrai français »; heureusement, le 18 mai 1917, il se battra aussi contre les bourgois sentimentaux, la tête ornée d'un pansement hérité grâce à un obus, afin que les artistes puissent s'échapper du théâtre en un morceau et ne subissent pas les foudres populistes.
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