9.10.06

Le Blues du trentenaire fini, Part I

L'acte surréaliste le plus simple consiste, revolvers aux poings, à descendre dans la rue et à tirer au hasard, tout ce qu'on peut dans la foule.

André Breton in Second Manifeste du surréalisme


À la mémoire de Fernande Savage (1919 - 2006)


Avertissement

C'est pas de la p'tite bière ce que je vais vous raconter. Fak si vous êtes pas assis, assoyez-vous. Si vous êtes des cœurs sensibles, retournez chez le libraire et faites-vous rembourser. Si vous aimez Marie Laberge, faites de même. Y aura pas de place à la pitié ici. C'est un territoire dangereux, certes, mais c'est mon territoire. Je définis les règles, suivez-les. Sinon vous pouvez aller vous faire foutre, c'est clair?

15 août 2004


Y aura pas de place au compromis ici, c'est pas la vraie vie, c'est pas une histoire vraie où vous pouvez brailler et passez à travers 3 boîtes de Kleenex. C'est pas la tite madame qui divorce pis qui a des états d'âme sur sa relation pendant quarante-cinq minutes, puis qui en parle à ces chums de filles qui lui disent de se mettre belle, de faire de l'exercice et de sortir pour rencontrer du monde. C'est de la fiction. J'espère que vous comprenez ce que ça implique et où ça peut vous amener. J'en ai vraiment rien à cirer des petits sentiments roses et des histoires à pleurnicher en cou-couple. Fak si vous êtes prêts pour la ride, tant mieux. Sinon, vous êtes au mauvais endroit, au mauvais moment. Car je n'aurai aucun pitié pour les victimes inopinées qui pourraient passer sur mon chemin : je les abattrai jusqu'à la dernière goutte de sang, je ferai brûler leur chair et je boirai le liquide qui circulait dans leurs artères. Je ne serai pas avare de boisson sanguinaire. En fait je pense même la commercialiser : Blood, me semble que c'est catchy comme nom...

Tout ce déversement inutile de sentiments a débuté à l'épicerie, comme il se doit, car c'est là que les drames les plus horribles se dévoilent aux yeux des caméras de surveillance et sont repris par les plus minables émissions de tivi. C'est peut-être l'odeur de la viande périmée, ou la vue des fruits abîmés qui m'a fait tilter, sais pas. Tout ce que je sais c'est que depuis ce 15 août 2004, je ne suis plus le même. Mes sens semblent décupler, je ressens des ondes étrangères, extraterrestres peut-être, mais une chose est sûre : quelque chose s'est déclenchée en mon être, et je ne trouve pas le bouton stop. Le pire dans tout ça est que je ne souhaite pas le trouver : allons au fond des choses.

Au fond tout ce que je cherche c'est d'aller à fond la caisse. Dans les allées du IGA, je ne ménage personne, et pourtant je suis de nature sociable, polie. Je tourne les coins ronds et je happe une grand-mère (mais qu'est-ce qu'elle faisait à l'épicerie à 23h45?). Pourtant j'aime bien ma grand-mère, je ne la vois pas assez souvent mais ce n'est pas raison suffisante pour enligner les mémés qui aiment shopper passé 18h! Je ne me reconnais plus. Je siffle les caissières... et pourtant, à bien y penser, elles ne le méritent pas (enfin pas toutes).

(Si vous me trouvez déjà relativement horrible, fermez le livre. Je n'ai pas l'intention de me censurer, et mon éditeur m'a promis qu'il ferait une bonne job. Il n'essaierait pas d'en faire un best-seller, anyways c'est vraiment pas le but de l'exercice.)

Quelques quidams universitaires font leurs emplettes : les nouveaux couples de l'été, les vieux couples qui s'endurent plus, les célibataires endurcis à lunettes trop épaisses, les has been qui continuent d'étudier dans le but avoué de se trouver des poupounes : à leur âge, à moins de vouloir fréquenter Le Lovers ou de cyberdater, y a plus grand choix. Évidemment, l'épicerie ressemble à un village irakien au lendemain de déflagrations massives : les brocolis tiennent à peine en place tellement ils voudraient qu'ont les apportent et qu'on les coupent en petits bouquets pour les tremper dans de la sauce Country Western; les pommes se battent sur les étagères pour trouver le plus de lumière possible : c'est bien connu, une pomme sous une lumière a beaucoup plus de chance d'être achetée puisqu'elle éblouit le cons-sommateurs : ses reflets sont divins, on se croirait au temps d'Adam, on a la pomme qui nous gratte.

J'ai envie de m'ouvrir une broue. WTF (ouate de phoque). On n'est pas en Afghanistan tout de même. Je peux bien m'ouvrir une bière sans que les gens s'offusquent. Ça l'air que non. On me regarde de travers. Les tites vieilles me fuient, me regardent d'un mauvais œil. Faudrait que leur petite-fille me présente à un dîner de Pâques. Je ferais fureur.

Tant qu'à y être, je m'allume une clope. S'il y a quelque chose qu'on n'a plus le droit de faire, c'est bien de se griller un petit bâton cancérigène, encore moins dans une épicerie (j'aurais dû essayer dans une pharmacie). Donc je déambule dans les rangées avec ma broue dans une main et la cigarette au bec : ça en fait rire quelques-uns ; les moins subtils font semblant de tousser (c'est mes préférés ceux-là). C'est sûr que le gérant va être «alerter» par une personne bien pensante, ça ne saurait tarder.

Comme de fait.

3 comments:

Nina louVe said...

Ouais!! Cru sans censure. Provocateur. Je n'irai plus faire mon marché là-bas. Promis.

Christian Roy, aka Leroy said...

Et ce n'est que la première de 6 parties ;-)

Mais t'inquiète, je ne tire pas sur les belles louves.

Et moi qui pensait que «le blues» était passé ni vu ni connu!

Nina louVe said...

Le Blues du trentenaire fini...
Il ne passe pas inapt perçu les fois d'après non plus. En attendant le livre, mister K, suis obligée de faire cliq en tripple trips par ici tsttss.

Jamais rien lu de tel nulle part. Arrête, j'tenvoie pas du ciment ni de la craie friable. Vrai, Ke tu le créille ou non superk. C'est ma tête qui parle pas mon ventre. Ce qui ne se dit, toi tu le texte et le poste.

Vian, c'est toi qui reviens vif et cruel, direct inventif sans censure ? Dis-moi que non, sinon, des plans pour que c'te fois, c'est moi qui crève à 39 ans. Alors tic tac, qurelle ironie, il ne me resterait que 350 kèk jours...