29.11.06

Ell&Il, prise 18

Elle et Il savent que leur avenir se trouve étroitement lié à Virabelle cette jeune déesse au coeur tendre mais dur comme le roc du cimetière en rose en fleurs en grâce éternelle et joyeusement éphèbe comme les tourterelles qui sommeillent dans le ciel enneigé de Brooklyn Tokyo Paris Montréal; Elle et Il reconnaissent que malgré leur désir de liberté leurs récentes actions imposent un karma douteux qui pourrait entaché leur légende leur vibrant hommage à la vie alors que les Berlinois gisent dans un lac d'hémoglobine rouge et or comme les vallées inondées qui parsèment les rivages houleux des mers désenchantées.

Elle et Il s'embarquent sur rame de métro par dessus quai par dessus ticket étudiant adulte avez-vous une carte d'identité avez-vous une foutue carte d'identité Elle et Il se crispent crissent les roues de leurs cerveaux déferlent comme des pierres douces et belles comme la peau de Virabelle qui fait passer le temps en observant les véhicules qui roulent au qui vive du coeur sur le boulevard St-Laurent du désir ininterrompu.

Elle et Il passent par St-Michel point mitoyen de leur chute et de leur arrivée simultanée lieu de transfert transmigratoire qui les mènera de Paris à Montréal en passant par Reykjavik et le Groënland; ils visiteront entre-temps les lieux saccagés des passages vikings deux millénaires trépassés sous l'océan bitumineux des alcools noirs d'Alberta; Elle et Il traversent des raz-de-maréeet des tsunamis arrivent en ville les quatre fers en l'air et se précipitent sur le premier venu la première mordue ils trouvent un pawnshop dans Centre-Sud miteux comme il se doit le propriétaire Raymond leur dit c'est pour quoi et ils répondent en coeur c'est pour un gun avez-vous un permis non parfait ça va être deux fois plus cher y en pas de problème rétorque Il qui sort ses liasses de liquide infecte et ses cartes fausses comme les promesses électorales.

Elle et Il paient leur dû they pay their dues commes des vieux bluesmen en visite dans la métropole à revisiter Robert Johnson en grattant de vieilles guitares battues la voix rauque qui baigne dans le Johnny Walker le rythme syncopé dans le sang comme une femme en mal d'amour; Elle et Il se disent simultanément sauvons Virabelle de cette vie de merde attaquant en plein jour comme des sauvages pas de plumes agissons maintenant pendant que l'air est chaud et que la chaire est tendre il n'y a plus une minute à perdre dans les transports en commun de toutes les villes parallèles et imaginaires de tous les mondes possibles et impossibles il faut mettre un terme au règne de la Merde pour que celui d'Ell&Il soit pour qu'il fasse taire les excréments de ce siècle de tous les siècles pour les siècles qui perdurent depuis trop longtemps dans la dichotomie du Bien et du Mal.

Elle et Il voient déjà leur trône au-dessus du 3½ caverneux de la rue St-Laurent au-dessus du stand à patate et de la pizzeria de monsieur Marcario il y aura fort à faire pour déjouer ces déchets qui survivent bon an mal an qui s'accrochent à la vie comme des coquerelles s'aglutinent au pied des saules-pleureurs l'automne.

Virabelle regarde l'oeil vitreux et hagard pendant que George revisionne pour la ixième fois le DVD de Miss Cumalot la main gauche plongé dans un bol de KY et la droite dans un sac de chips au vinaigre; Jean-Thomas grille une Camel la soirée a été longue et les queues se sont faites rares il pleuvait l'automne approche mine de rien les aventuriers des parcs Lafontaine Central Park Tokyo Bay Bois-de-Boulogne se font timides à l'approche du grand gel.

Quoi de mieux que de ruminer en silence le passé glorieux de la Merde et la vengeance froide qui sera servie dans un ramequin d'argent.

La Merde suce lèche gémit pour payer son loyer car Jean-Thomas déçoit n'a plus la même ardeur au travail George ne fait rien que se branler et Virabelle quoiqu'on en pense est toujours clouée à la maison depuis qu'Elle est partie impossible de lui faire dire faire quoique ce soit elle reste figée dans une stupeur imparable un spectre passerait sous son nez qu'elle ne ferait que lui montrer l'oiseau du creux de la main celui qui s'élève vers le soleil et qui cause l'affront de l'irrespect chaque fois qu'il se pointe vers le Créateur.

Elle et Il prennent la ligne bleue direction Snowdon pour débarquer à De Castelnau près de l'ancien parc Jarry ils montent un peu plus haut croisent le poste de police et se dirigent lentement comme des félins vers l'antre de la matrice de la Merde Toute-Puissante; Jean-Thomas les aperçoit du coin de l'oeil tire une dernière bouffée de sa Camel et dit à Virabelle viens je veux te montrer quelque chose; il l'amène dans sa chambre et tire le dernier tiroir de sa commode au fond duquel se cache un faux-tiroir où se trouve un poignard datant de la Deuxième Guerre utilise-le s'il le faut c'est tout ce qu'il lui dit et de ses yeux prépubères mais écoeurés de subir les injustices familiales elle sourit enfouit le poignard entre ses seins que retienne un soutien-gorge usé à la corde mais toujours efficace pour sa jeune poitrine en devenir.

***

Ell&Il croise du regard Jean-Thomas qui le leur rend il fait signe de la tête que la Merde est en arrière en train de besogner le loyer en nature Ell&Il passe par la ruelle prend l'escalier qui mène au troisième étage fracasse la fenêtre de la Merde la bouche prise par un plaisir pourri; George n'enttend que dalle trop épris par Miss Cumalot qui se fait chevaucher par Black Stallion; George râle George sue de partout George est vraiment dû pour un bain une douche un jet d'eau n'importe quoi d'hydraulique; Jean-Thomas se poste devant la porte de la Merde qui n'a toujours rien vu jusqu'à ce qu'elle apreçoive les bottes d'Ell&Il débarrassant la fenêtre des derniers morceaux de vitre; la Merde relève la tête la bouche hébétée pleine d'amour; entre ses deux yeux s'achemine une balle de plomb flambant neuve une balle qui mettra un terme à son règne une balle qui libèrera Virabelle.

La Merde s'écroule sur l'engin ruisselant du proprio-pusher-pimp qui crie osti d'câlice de tabarnak Elle kessé t'as faite là?!? Je fais ce que j'aurais dû faire depuis longtemps mettre un terme à mon esclavage accomplir le matricide que les érynnies me poursuivent jusqu'à ce que folie s'en suive et une deuxième balle vient se loger entre les arcades sourcillères pour achever ce cravaté crasseux; Jean-Thomas tente d'étouffer le tumulte en criant osti d'câlice de chaise à marde prétextant s'être cogné le petit orteil sur l'arbre défait mais George malgré sa turpitude malgré sa fascination pour Miss Cumalot renfile son caleçon et s'approche de Jean-Thomas menaçant:

- M'man as-tu fini?
- Je le sais-tu moé.
- Oui tu le sais JT fais pas l'innocent.
- Comment tu veux que je le sache chus pas dans chambre à coucher à ce que je sache

Et George lui assène une droite en pleine mâchoire qui le fait voler sur le coin de la table le crâne ouvert le sang rigole.

George hurle m'maaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaan lorsqu'il la voit écroulée une balle entre les deux yeux et son proprio-pimp-pusher dans la même position Ell&Il dit c'est finalement notre tour to rule the world on ne subira plus rien on va te faire payer pour tous les coups de fouet de strap de queue l'humiliation de 6 à 17 ans tu vas payer mon osti et Ell&Il tire mais le gun jamme la balle ne part pas; George a juste le temps de se resaisir et de frapper Ell&Il à la tête dans sa chute Ell&Il tire l'arme s'enclenche et la balle s'extirpe du métal hurlant mais c'est pour s'échouer dans l'estomac d'Ell&Il les rames de métro passe Tokyo Harajuku Staten Island Vatnajokull Mont-Royal Châtelet St-Germain Gare St-Lazarre Angrignon terminus.

***

Virabelle a tout vu tout entendu. Virabelle s'élance dans le dos de George et plante le poignard au creux de ses reins, tendrement, pendant que Miss Cumalot scande cum you big black mother fucker.

George s'écroule. Le sang gicle comme une fontaine alors que Virabelle l'enfonce aléatoirement dans son dos, sa nuque, sa queue, ses yeux. George est secoué de violents spasmes. Puis tout s'éteint.

« Je suis la Nouvelle Merde! », s'époumone Virabelle pendant que Skip James vide son fiel en braillant Cypress Grove Blues.

15 comments:

Jack said...

Ouais! Un beau grand chapitre que je me réserve pour demain. Il est around minuit, ni à Tokyo, ni à Paris... La nuit, les trains ne font pas miaule. Je rejoins ma femme qui dort.

Christian Roy, aka Leroy said...

Awright bonne lecture!

Tes commentaires sont toujours appréciés, Grand Jacques.

Anonymous said...

Hmm... 2 questions... Même 3! :p

1) Elle et Il sont devenus un seul?

2) Ils ne voulaient pas prendre leur temps pour la vengeance?

3) Ah zut, la Virabelle, je m'y attendais pas! :O
(Ah, c'est pas une question, donc ça ne fait que 2... ouais, je suis douée en maths aussi...)

Christian Roy, aka Leroy said...

1) oui. Ell&Il, c'est ça le concept, deux personnes qui ne font qu'une. pendant tout le récit, elles se cherchent jusqu'à ce qu'elles se trouvent. dans la dernière partie elles se fondent l'une dans l'autre.

2) non. Ell&Il est un être impulsif, pas réfléchi. c'était maintenant ou jamais.

3) moi non plus. ça m'est venu tranquillement. j'imaginais une pièce shakespearienne où tout finirait dans un bain de sang. j'ai choisi virabelle pour leur survivre.

ps: moi aussi je suis doué en maths :)

Anonymous said...

Ça me rassure, je ne suis pas passée complètement à côté de la plaqu! :D

Anonymous said...

*plaquE même

Christian Roy, aka Leroy said...

c'est bon t'as encore toute ta tête :)

ps: ça serait chouette de t'entendre le lire, avec ton accent ;-)

Anonymous said...

Tu veux rire? Avec mon accent de "bourgeoise française"? :O (Elle va me poursuivre, celle-là...)

Christian Roy, aka Leroy said...

Justement :)

Et tu sais avec mes oreilles de Québécois, vous avez tous un accent bourgois :-P

Anonymous said...

merci superk

Christian Roy, aka Leroy said...

huh merci pourquoi, chère nina?

Anonymous said...

Bin (rires) Pour les mots staffaire!!
Pour ce que j'ai pu lire ici chez LKM pendant septembre octobre et novembre. C'est quand même pas toujours à l'éccrivain d'aller se pencher pour cueillir l'aumone de quelques phrases. La gratte la gratte ti tude !!

Allez ouste, va écrire encore.

Nina Louve

Christian Roy, aka Leroy said...

ok, j'arrête de gratter les mercis et jmen va pondre qqchose de bo :)

j'ai des tites idées dans ma tête, s'agit de le scénariser, liquidement parlant.

Nina louVe said...

Je suis en manque. T'as des idées tu disais pour un enouvelle série décapante ? J'ai FAIM. Grrrrrr!

Nina louVe said...

On peut pas dire que tu t'es trompé dans le type de "nourriture".

L'érotisme c'est parfait!